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31 décembre 24

12H10

 

Glory Box déverse ses basses langoureuses dans l’habitacle.

Je ne sais pas écouter la musique à un volume raisonnable.

Je ne sais rien faire de façon raisonnable d’ailleurs. À quoi bon ?

 

Le volume de la musique baisse imperceptiblement, laissant place à la sonnerie de mon téléphone qui m’annonce un message.

« Tu squattes tout notre clan, tu dois en faire un peu partie. »

Comme pour en rajouter une couche, le message est suivi d’un émoji boudeur.

 

Une réponse à mon vocal décousu et surexcité qui soulignait une synchronicité. Je venais de recevoir, en moins d’une minute, un message de lui, de sa sœur, et de sa nièce.

 

J’éclate de rire. Un vrai rire, celui qui vient du cœur, qui fait monter une bouffée d’amour depuis l’intérieur. Un rire qui réchauffe, qui illumine.

 

Son message n’a pas l’air de grand-chose, mais il est un miracle.

C’est un condensé de quarante ans de vie. Quarante ans d’appartenance au clan.

Quarante ans d’amitié, d’amour, de non-dits ou tout est dit, de discussions, de distances, de fous rires, de larmes.

D’incompréhensions aussi, beaucoup, mais a-t-on besoin de tout comprendre chez l’autre pour l’aimer ?

 

Un condensé pour celui qui ne sait pas toujours quoi faire des choses qui viennent du cœur.

Pour celle qui décortique tout, absolument tout.

 

Le message a dansé dans ma tête pendant des heures.

Il a fait monter des larmes de bonheur dans mes yeux.

Ça a l’air idiot. Le message est idiot. Aussi idiot que d’être jetée dans la neige un soir de réveillon, en robe légère et talons hauts…

 

Alors moi je sais…

 

Give me a reason to love you

Give me a reason to be a woman

I just wanna be a woman…

 

Il y a tellement de raisons.

Celles qui dissolvent le fardeau du passé, redonnent de la densité, de l’existence à la femme que je suis aujourd’hui.

 

Ce message est un des codes secrets de l’énigme. Une des clés de voûte des mystères, des incertitudes que j’ai traversés ces derniers temps.

Il m’apporte la certitude absolue d’être aimée pour toujours.

Même depuis l’autre bout de la planète, même aux confins de la Voie lactée.

De toute manière, je suis un astéroïde, paraît-il.

 

Alors, je vais aller visiter tout ce que mon besoin de liberté me poussera à explorer.

Je peux de nouveau disparaître, laisser des silences immenses, oublier les anniversaires, écrire pour ne rien dire, danser jusqu’à en perdre le souffle, puis revenir en éclats de rires et en larmes.

 

Tour à tour, ils me l’ont dit cette année. Ils sont formels : je fais partie du clan.

C’est une sensation indescriptible dans le cœur.

Ça doit être ça, la « gratitude ».

 

 

 

Pouvoir le ressentir, tant qu’on est vivant…

Le vide que l’on laisse en partant, mais aussi le plein.

Une autre loi que l’univers m’aura soufflée cette année.

 

« Regarde… Il est parti sans rien. Les placards sont remplis de matériel à lui. On n’emmène rien dans notre tombe. »

 

Des affaires qui encombrent le passage, comme autant de manques que son absence a laissés avec son départ. Nous rappelant aussi, inlassablement ce qu’il a laissé flotter dans l’air.

 

Et ça, ce n’est pas de l’amour ?

M’avoir fait une telle place au cœur de cet ouragan qu’a été la maladie.

 

Je suis toujours entrée chez eux comme dans un moulin, accueillie par un joyeux :

« Elle va comment, maman ? »

C’était son côté italien : les mamans, la famille, c’est sacré.

Alors je venais souper quand j’étais en perdition.

Je riais de les voir se disputer. Il y avait tellement d’amour dans leurs engueulades.

Je les enviais tellement que je leur disais :

« Moi aussi, je veux un homme avec lequel je pourrais m’engueuler d’amour. »

Il disait à ta femme :

« Elle est folle, ta pote. »

Ils se moquaient de moi gentiment.

 

 Et puis ce fameux dimanche, une ultime dispute. Comme pour me donner raison.

« C’est si beau, l’amour. »

 

J’ai pleuré un peu, on a ri beaucoup.

Je savais que je ne le reverrais plus. Enfin, si… Je le verrais toujours dans le regard de sa fille, dans les paroles de sa femme.

Aussi, dans ce qu’il m’a laissé :

 

« Ne jamais parler en mal des gens qui ne sont pas là. Ne jamais parler des gens en mal tout court, d’ailleurs.

Et puis souris et kiffe la life, merde ! »

 

Je vous disais : le vide… le plein !

L’équanimité.

Les miracles.

 

Pas les extravagants, les grotesques, les rutilants.

Plutôt ceux qu’on vous glisse discrètement dans la main le matin de Noël.

Les mots cachés dans une enveloppe dorée.

Ceux qui viennent compléter à la perfection la formule secrète et divine qui vous enjoint à l’apaisement.

Ceux qui viennent vous cueillir tendrement et vous disent que ça y est... Il n’y a plus rien à faire pour être aimé. Que je peux simplement rester là, assise en pyjama sur la marche de l’escalier, devant le sapin illuminé, et profiter de la vie qui s’installe autour de moi.

 

Entendu aussi cette semaine : l’arrogance et la moquerie dans la bouche du père de mon enfant qui dit qu’à vingt-quatre ans, notre fils est toujours « le petit garçon de sa maman. »

Percevoir au-delà du ton, le cadeau précieux.

Se sentir reconnue, enfin, d’avoir été une mère suffisamment bonne.

 

La gratitude, c’est aussi ce merci ému pour les personnes qui ont fait un bref passage dans ma vie et qui ne sont pas destinées à y rester.

Remercier ceux qui m’ont donné des leçons…

Merci aussi à la déception que je ressens en acceptant de les voir partir…

Moi, j’y avais cru un peu…

 

 

« Fucking wonderful life »

 
 
 

1 Comment

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Cecile
Jan 01
Rated 5 out of 5 stars.

Juste un gros cœur sur toi. Pour qui tu es, pour ce que tu as fait pour nous, et pour nous avoir aimé dans nos ombres et aussi avoir vu notre lumière. Je t’aime et il t’aimait

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