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La philosophie du porc et autres personnalités plésiomorphes.


Le dos de son index vient caresser la partie nue de ma cuisse. Cette partie tendre, un peu fraiche du dessus de la jambe. Il repousse le bord de ma tenue et s’aventure sur quelques centimètres supplémentaires, gagnant de toucher une part cachée. Le geste fut agile, rapide. Il n’a probablement durée qu’une infime seconde. Rien, absolument rien ne prédisait que j’allais devoir subir cette attaque. Ni le timbre éteint de sa voix de male, ni notre conversation insipide n’avait présager cette incursion.

Je reste stupéfaite. Un peu égarée. Je n’ai pas eu le temps battre en retraite, mon corps a utilisé toute son énergie pour se refermer dans sa coquille. Comme une huitre, comme un escargot, comme un hérisson... Comme un animal inoffensif, soumis. Je ressens un peu de honte de ne pas être un animal de combat dans ce moment-là.

Je sais ; m’enfuir à toute jambe, me replier en moi, me fondre dans le décor. Mais je ne sais pas rugir, ni mordre.

Un espace de vide, de latence s’installe en moi.

Il s’est éloigné de quelques mètres jugeant probablement qu’il avait gagné. Et alors il jubile. Je l’entends dans sa voix, elle déraille sur chaque virgule, sur chaque voyelle. Il a le rire fuyant et pathétique d’une hyène. Il a l’instabilité des hommes qui n’ont pas d’attribut, pas de courage, pas de classe. L’étroitesse de son esprit nourrit en lui une conception du respect comme d’une idéologie patriarcale et rigide, ne lui donnant aucun accès à l’idée de consentement. Il est aussi vide qu’une marionnette de papier mâché avec son teint gris et son sourire plaqué. Je le plains.

Lui il ne ses rends compte de rien, il continue de me parler, enivré par son geste. Il parle, il parle, il ne s’arrête plus.

Lui qui n’est pas mon ami, qui n’est pas un proche, pas même une connaissance. Lui qui n’est rien il se permet de s’épancher sur le plaisir des femmes...

-C’est que ces dames sont coquines avec les années...

Il s’agite devant mon silence, se dandine mal à l’aise. Il sort un tube de baume à lèvres comme le fond les adolescentes pour se donner un peu de contenance. Il commente ;

-J’ai les lèvres sèches en ce moment...

Je n’avais pas ouvert la bouche depuis ces quelques interminables minutes.

-T’as bouffé trop de chattes en feu !

Je venais de lui cracher au visage sa connerie enrobée de mon dédain.

Il s’est tu net après avoir bégayé quelques mots incompréhensibles. Puis je l’ai vu tomber comme une quille. Écraser sa face en carton-pâte sur la terrasse de bois, sidéré par les images trop crues que mes mots avaient fait défiler dans son cerveau frustré et immature.

Le nez dans ma tasse à café je jubile, je viens de regagner ma tranquillité. Elle a l’air anodine et désuète cette petite victoire, cette reprise de pouvoir. Elle est pourtant essentiel dans un monde qui vomit encore ça et là quelques personnalités plésiomorphes.

Et alors j'ai balayé les débris de cette pantomine, laissant glisser rapidement l'évènement dans les entrailles de l'oubli ne gardant de l'expérience que la lumière que l'on met sur les ombres.






 
 
 

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